À 5 heures 30, le lundi de Pâques du 9 avril
1917, le barrage rampant de l'artillerie se mit assidûment
en marche vers les Allemands. Derrière ce barrage,
20 000 soldats des premières vagues d'attaque des
quatre divisions canadiennes foncèrent, les bataillons
donnant l'assaut côte à côte alors qu'un
grand vent du nord-ouest balayait la campagne de neige et
de verglas. Guidés par des jalons marqués
à la peinture, les compagnies de tête traversèrent
un No Man's Land dévasté, se frayant un chemin
à travers les trous d'obus et les tranchées
défoncées. Chaque soldat portait une lourde
charge d'au moins 32 kilogrammes de matériel, en
plus, certains disaient, un poids égal de boue qui
couvrait les uniformes et le matériel. Ce fardeau
rendait particulièrement difficile la traversée
des tranchées et des cratères.
Il y eut quelques corps à corps, mais la résistance
la plus sérieuse (comme les pertes canadiennes les
plus élevées) vint des nids de mitrailleuses
fortifiés de la deuxième ligne allemande.
Venant à bout de cette résistance, trois des
quatre divisions de la ligne canadienne, capturèrent,
comme prévu, leur partie de la crête vers le
milieu de la journée. À l'étape finale,
la 2e Division canadienne reçut l'aide de la 13e
Brigade britannique sous son commandement pour cette opération.
La cote 145 était le principal objectif de la 4e
Division canadienne et le point le plus élevé,
ainsi que le plus important de toute la crête de Vimy.
Une fois prise, elle devait assurer aux Canadiens une position
dominante leur permettant de voir les défenses arrières
des Allemands dans la plaine de Douai et celles qui restaient
sur la crête elle-même.
Étant donné son importance, les Allemands
avaient fortifié la cote 145 en l'entourant de tranchées
et de barbelés et en y aménageant un réseau
d'abris souterrains profonds sur la pente arrière.
Les brigades de la 4e Division subirent le feu provenant
du « Bourgeon », l'autre position dominante,
qui faucha les premières vagues des soldats d'infanterie
qui avançaient. Des attaques répétées
furent données en utilisant les troupes qui devaient
d'abord attaquer le « Bourgeon ». Finalement,
dans l'après-midi du 10 avril, une brigade de relève
nettoya le sommet de la cote 145 et plaça toute la
crête de Vimy entre les mains des Canadiens. Deux
jours plus tard, des unités de la 10e Brigade canadienne
s'emparaient du « Bourgeon ». À ce moment-là,
considérant la perte de la crête de Vimy comme
définitive, l'ennemi s'était replié
à plus de trois kilomètres.
La crête de Vimy fut le seul succès d'importance
remporté par l'offensive alliée au printemps
de 1917. Mais bien qu'ils eussent remporté une grande
victoire de la tactique, les Canadiens ne purent l'exploiter
assez vite pour faire une percée, du fait surtout
que leur artillerie s'était embourbée et était
incapable d'avancer avec eux sur un terrain boueux et déchiré
par les obus. Les artilleurs canadiens utilisèrent
les canons allemands dont ils s'étaient emparés
et qu'ils avaient appris à manier auparavant.
Le fait que les Canadiens réussirent à capturer
Vimy fut attribuable à une planification méticuleuse
et avisée, ainsi qu'à une préparation
rigoureuse destinée à minimiser les pertes.
Mais ce furent le courage et le sens du devoir extraordinaires
des officiers et des soldats canadiens au combat qui furent
les éléments décisifs. Pour la plupart,
des citoyens devenus soldats, ils se comportèrent
comme des professionnels.
Les Canadiens attaquèrent avec beaucoup de courage
les postes de mitrailleuses allemandes, l'obstacle le plus
important à leur avance. Ils sauvèrent ainsi
la vie de nombre de leurs camarades. Quatre d'entre eux
gagnèrent la Croix de Victoria pour le courage dont
ils firent preuve lors de ces exploits dangereux. Trois
de ces croix furent gagnées le premier jour de la
bataille.
Le soldat William Milne, du 16e Bataillon, obtint la Croix
de Victoria du fait d'avoir rampé jusqu'à
un poste de mitrailleuse allemande d'où l'on tirait
sur les Canadiens qui avançaient, d'avoir bombardé
l'équipe ennemie et capturé l'arme. Plus tard,
il traqua un second poste de mitrailleuse et tua les servants.
Il s'empara de l'engin, mais fut tué peu après.
Le soldat Milne n'a aucune sépulture connue.
Le sergent suppléant Ellis Sifton, du 18e Bataillon,
donna l'assaut seul contre un poste de mitrailleuse, sauta
dans la tranchée qui l'abritait et tua tous les servants.
Peu après, il tomba sur un petit groupe d'Allemands
qui avançaient dans la tranchée. Il parvint
à les tenir à distance jusqu'à ce que
ses camarades arrivent, mais dans un dernier souffle, l'une
de ses victimes tira sur lui.
Pendant la bataille visant à prendre la cote 145,
le capitaine Thain MacDowell, du 38e Bataillon, pénétra
dans un abri profond et joua de ruse pour amener 77 gardes
prussiens à se rendre. Il captura deux mitrailleuses
en faisant croire à l'ennemi qu'il avait derrière
lui de nombreux effectifs. Ses nombreux effectifs ne comptaient
que deux soldats. MacDowell gagna l'Ordre du service distingué
sur la Somme.
Le 10 avril, le soldat John Pattison, du 50e Bataillon,
sauta de trous d'obus en trous d'obus jusqu'à 30
mètres d'une mitrailleuse ennemie. Se trouvant à
bonne distance, il lança une grenade sur l'équipe.
Puis il donna l'assaut à la baïonnette aux cinq
servants qui restaient. Pattison fut tué deux mois
plus tard.
À Vimy, le Corps d'armée canadien avait quand
même gagné du terrain, fait plus de prisonniers
et capturé plus d'armes que n'importe quelle autre
offensive britannique antérieure en deux ans et demi
de guerre. Ce fut l'un des combats le plus complet et le
plus décisif de la Grande Guerre et la plus grande
victoire alliée de l'époque. Les Canadiens
avaient montré encore une fois qu'ils constituaient
l'une des meilleures formations sur le front occidental
et qu'ils étaient passés maîtres dans
l'art de la guerre offensive.
Même si la victoire à Vimy fut rapide, elle
fut néanmoins coûteuse. Il y eut 10 602 pertes
canadiennes, dont 3 598 morts. Les bataillons des premières
vagues d'assaut furent durement éprouvés.
On ne saurait parler d'un niveau acceptable de pertes, mais
celles de Vimy furent inférieures à la terrible
norme des autres assauts importants sur le front occidental,
et nettement moindres que celles des offensives précédentes
sur la crête. Des combats menés auparavant
par les Français, les Britanniques et les Allemands
avaient occasionné au moins 200 000 pertes. Ce fut
la planification soignée du commandant du Corps d'armée,
sir Julian Byng et de son bras droit, Arthur Currie, qui
permit de minimiser les pertes canadiennes.
La réussite des Canadiens à Vimy a constitué
un point tournant pour les Alliés. Un an et demi
plus tard, la Grande Guerre était terminée.
Les succès des Canadiens, couronnés par leurs
réalisations à Vimy, eurent pour effet que
le Canada signa, à titre de pays souverain, le traité
de paix de Versailles qui mit fin à la guerre. Au
pays, la victoire remportée à Vimy par des
troupes de tous les coins du pays, aida à susciter
chez nombre de Canadiens un sentiment de fierté nationale
à l'égard du courage des citoyens-soldats
du Canada et à créer un véritable sentiment
d'appartenance nationale.